J'ai reçu ce mot d'une lectrice, dimanche:
"Bonjour, Je ne suis pas tombée par hasard sur votre roman. Une amie m'a fortement recommandé de me le procurer. Et j'ai compris pourquoi, après quelques pages J'en ai eu le souffle coupé. Vous décrivez des pans de nos vies. Mon mari et moi sommes musiciens et nos 2 filles étudient au Conservatoire. Vos références sont probalement les nôtres. Vos personnages sont originaux et ils sont vrais (ils ressemblent à des profs, des amis, des collègues) et votre histoire, si bien ficelée, est celle de musicens d'ici. Jusqu'ici, j'ai lu des histoires de musiciens d'ailleurs et enfin, vous décrivez avec des mots justes la dure réalité de ceux d'ici. J'aimerais bien que vous exploitiez à nouveau le filon. Merci de tout coeur pour ces heures d'agréable lecture. Bonne continuité."
Ce mot m'a beaucoup touché.
Lorsque j'ai publié mes premiers livres pour enfants, la série Bozo Nolet-Leclou, il est arrivé à quelques reprises que des parents de jeunes lecteurs me disent quelque chose comme "Geoffroy (ou Olaf, ou Marie-Courge) s'esclaffait à tout bout de champ en lisant votre livre."
Rien ne pouvait me faire plus plaisir. Imaginer un instant que, dans une maison, quelque part, un soir, un enfant rit. À cause de moi.
Et là, cette dame, musicienne, qui a reconnu des morceaux de son univers dans mon roman, c'est comme une injection de vitamines.
L'écriture s'effectue dans la solitude et, pour moi en tous cas, dans le silence.
On part d'une idée. D'une scène qu'on a imaginée, d'une fin tragique ou d'un rebondissement farfelu. On travaille. Le récit s'organise petit à petit. Des milliers de décisions qui se prennent à la milli-seconde, ou qui nous hantent tout une fin de semaine. Le personnage devrait-il aller par ici ou par là? Pourquoi est-ce qu'elle porte un chapeau? Et de quelle couleur? Et pourquoi pas une tuque?
À la fin, on ne sait plus rien. La fin de l'histoire survient quand notre capacité de décider est épuisée. Vas-y sans moi. Tu es grande maintenant. Prends tes propres décisions, dorénavant. Moi j'abandonne.
Et puis un jour, une lectrice ramasse ton livre. Toutes ces décisions ridicules que tu as prises sur toutes ces situations inventées ou issues d'on ne sait où dans ton esprit, elle les rassemble et les organise dans sa tête à mesure que sa lecture avance. Elle les intègre à ses propres informations, aux détails de sa propre existence, et un sentiment ou une impression émerge de son expérience. Le verdict devient presque accessoire. "J'ai aimé cette histoire". "Je n'ai pas aimé cette histoire".
Avouez que c'est fantastique.
Je suis pas mal chanceux, je trouve.